Conflit banques/courtiers : soutien du gouvernement aux intermédiaires

Conflit banques/courtiers : soutien du gouvernement aux intermédiaires

 Cela fait des années que les relations entre les banques et les courtiers sont tendues, les premières estimant pouvoir se passer du service des seconds malgré des contrats de partenariat. Une situation que le gouvernement avait laissé pourrir, avant de prendre fait et cause pour les intermédiaires quant à l’opposabilité du mandat de courtage aux tiers.

Mandat de courtage : opposable aux banques

Le niveau historiquement bas de taux d’intérêts ces dernières années avait mis à mal les relations de partenariat entre les banques et les courtiers en crédit immobilier. Pour préserver leurs marges sur des crédits peu rémunérateurs, les banques estimaient pouvoir faire cavalier seul en dehors de toute considération de la règle contractuelle les liant aux intermédiaires. Certains établissements n’avaient pas hésité à faire savoir qu’ils allaient dorénavant se passer des courtiers, d’autres qu’ils diminuaient la commission versée pour apport d’affaires. Du jour au lendemain, des partenariats étaient rompus au mépris de toute règle de bonne concurrence.

Alerté par la profession, le gouvernement n’avait jusqu’alors pas jugé bon d’intervenir, se contentant de rappeler « la liberté contractuelle des parties dans le cadre de relations commerciales librement consenties ». Changement de braquet depuis la question posée en août dernier au ministère de l’Économie par le député Frédéric Cabrolier (question écrite n°947).

Appuyé par l’Union des Intermédiaires de Crédit (UIC, premier syndicat des courtiers de France), l’élu RN du Tarn a voulu alerter une nouvelle fois l’exécutif sur les multiples entraves à la liberté d’exercice des 34 000 courtiers en prêt immobilier, et ce, au détriment des consommateurs. La réglementation interdit à une banque de refuser d’instruire le dossier d’un client conseillé et mandaté par un courtier (article L.121-11 du code de la consommation), mais plus d’une quarantaine d’infractions ont déjà été signalées, en vain, aux autorités compétentes, à savoir l’ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution) et à la DGCCRF (Répression des fraudes).

Rendue publique le 5 janvier dernier, la réponse ministérielle est sans appel :

– « Le code civil dans son article 1984 dispose de l’opposabilité de la notion de mandat et son article 1200 commande aux tiers le respect d’un contrat passé entre deux parties. Dès lors, comme tout contrat, celui passé entre un courtier et son client doit être respecté ».

– « Le code du commerce proscrit à l’article L.420-1 de limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence, ce qui devrait en droit empêcher les établissements bancaires d’évincer les courtiers du marché ».

Dont acte !

Le ministère invite tout consommateur ou professionnel à saisir les juridictions compétentes s’il estime que le cadre réglementaire a été enfreint. Et de nommer la DGCCRF, ce qui engage clairement cette autorité de contrôle à faire respecter les dispositions prévues par le code monétaire et financier, le code de la consommation et le code civil applicables aux activités d’intermédiation bancaire.

Le rôle majeur des courtiers

La réponse du gouvernement devrait faire date en rappelant au grand méchant loup bancaire qu’il ne peut s’arroger le droit d’outrepasser les dispositions légales. Sur la ligne de front depuis trois ans, Bérangère Dubus, présidente de l’UIC, se félicite d’un « rappel à la loi salutaire qui va permettre aux emprunteurs de choisir librement leur interlocuteur et aux courtiers d’exercer en toute transparence ». Au-delà de l’aspect réglementaire, cette réponse est une victoire sur le plan de la reconnaissance accordée à la profession de courtier.

En 2021, 40% des prêts immobiliers ont été consentis par l’intermédiation des courtiers et à l’avenir, le rôle de ces experts auprès des emprunteurs devrait être renforcé face aux difficultés d’accès au crédit immobilier depuis mi-2022. L’usure est une problématique majeure qui agite toujours le secteur immobilier en ce début d’année. Les perspectives pour le marché immobilier 2023 sont plutôt moroses et risquent malheureusement de réitérer le scénario de 2022 avec un crédit devenu difficilement accessible à cause d’un système réglementaire dysfonctionnel, mais les autorités financières refusent toute réforme des taux d’usure en 2023.

Banques et courtiers affrontent le phénomène de concert, tous deux sont pénalisés par une situation qui réclame d’urgence des aménagements pour éviter l’effondrement du marché immobilier. Il serait bien que le gouvernement réagisse rapidement, plutôt que laisser la situation se dégrader davantage, comme il l’a fait au sujet du conflit opposant banques et intermédiaires.

Par Astrid Cousin
Le 10/01/2023

Magnolia

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Crédit immobilier : vers une actualisation mensuelle du taux d’usure ?

Crédit immobilier : vers une actualisation mensuelle du taux d’usure ?

Crédit immobilier : vers une actualisation mensuelle du taux d’usure ?

Les professionnels du crédit immobilier sont conviés par la Banque de France à une réunion de consultation sur l’actualisation mensuelle temporaire du taux maximum auquel on peut emprunter. Réévalué tous les trois mois, il empêcherait certains ménages d’emprunter.

Une rencontre est organisée à la Banque de France ce mercredi matin pour réfléchir à une mensualisation temporaire du calcul des taux d’usure pour les crédits immobiliers. (Illustration) LP/Aleister Denni

On croyait le dossier clos par la Banque de France. Et pourtant. Celle-ci a envoyé vendredi, à la surprise générale, une invitation à tous les acteurs du crédit immobilier pour « une réunion de consultation sur la mensualisation temporaire du calcul des taux d’usure », le taux maximum auquel on peut emprunter. Au lieu d’une revalorisation trimestrielle, laquelle a d’ailleurs porté le 1er janvier le taux d’usure à 3,57 % pour les prêts de 20 ans et plus. La rencontre, organisée ce mercredi matin, sera coanimée par la direction générale du Trésor, une des services de Bercy.

Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et des Finances, s’était d’ailleurs dit à plusieurs reprises préoccupé par le dossier et à l’écoute des courtiers. Fait inédit, ces derniers avaient, à l’initiative de l’Union des intermédiaires du Crédit, manifesté le 20 septembre devant le siège de la Banque de France avant d’être reçu par le gouverneur. Celui-ci avait alors affirmé avoir accéléré la collecte des données auprès des banques pour que le taux d’usure colle au plus près aux taux pratiqués. Insuffisant semble-t-il, la folle remontée des taux de crédit excluant de 10 % à 40 % des emprunteurs selon certains courtiers.

« Ça bloque tout mon projet immobilier » : ces emprunteurs qui pâtissent toujours du taux d’usure. Depuis, le dossier taux d’usure était semble-t-il passé au second plan. La Banque de France nous répétait la semaine dernière que ce taux maximum auquel on peut emprunter n’était pas la cause principale du ralentissement de la production de crédits immobiliers. Mais que cela était davantage dû à la hausse des taux de crédit ou des acheteurs dans l’attente d’une baisse des prix de l’immobilier. « Le taux d’usure n’a pas empêché de faire, 218 milliards de nouveaux prêts cette année », analysait Marie-Laure Barut-Etherington, directrice générale adjointe à la direction des statistiques, études et international.

Sauver le premier semestre 2023

« Depuis le temps que nous attendons cette réunion, nous sommes vraiment impatients », se réjouit Estelle Laurent, responsable communication du courtier Credixia et administratrice de l’Association française des intermédiaires en bancassurance, qui sera présente lors de cette rencontre. À ses côtés se tiendront des représentants des autres associations professionnelles représentant les Intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOSBP), de la Fédération bancaire française et de l’Association des sociétés financières. Il faut dire que le temps presse. Car la remontée du taux d’usure au 1er janvier a, selon plusieurs courtiers, déjà été effacée par les nouvelles grilles de taux de crédit envoyées par les banques dont les conditions de refinancement se dégradent, en particulier pour celles qui ont en partie recours aux marchés. « Il faut agir vite, c’est le premier semestre qui est en jeu », plaide Estelle Laurent de Credixia. À partir de l’été, le ralentissement de la hausse des taux de crédit devrait en effet rendre le taux d’usure moins problématique pour l’obtention d’un crédit immobilier.

Par Maxime Gayraud
Le 10 janvier 2023 à 13h23

Le Parisien – Lire l’article en ligne

Décodage

Décodage

On perce le coffre-fort

Crédit immobilier : la victoire des courtiers. L’UIC (Union des Intermédiaires de Crédit) remporte son bras de fer contre certaines banques. Interrogé par le député RN du Tarn Frédéric Cabrolier, sur le fait que « certaines banques ont décidé depuis 2019 de refuser tout dossier de client choisissant d’être conseillé par un courtier », Bercy répond (JO du 20 décembre) : « Ces dernières années, les courtiers ont joué un rôle de plus en plus important dans le bon fonctionnement du marché immobilier et les services qu’ils proposent sont très appréciés des emprunteurs. L’exercice de leur activité et les services qu’ils rendent aux consommateurs qui choisissent de recourir à leur intermédiation sont prévus par la loi et inscrits dans le code monétaire financier (…). Les acteurs du marché qui enfreindraient cette législation s’exposent notamment à de lourdes sanctions de la part de l’Autorité de la concurrence. » Réaction de Bérengère Dubus, infatigable secrétaire générale de l’UIC, basée à Montpellier : « L’UIC ne voit pas tant dans cette réponse la victoire des courtiers que celle des futurs emprunteurs. » En période d’augmentation des taux, le rôle des courtiers en crédit va devenir en effet des plus stratégiques. Plus à lire en cliquant ici.

hubertvialatte.com
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Le 09 janvier 2023

Le gouvernement soutient les IOBSP face aux banques

Le gouvernement soutient les IOBSP face aux banques

Le ministère de l’Économie et des Finances a rappelé dans une réponse ministérielle l’opposabilité du mandat aux tiers et les sanctions en cas de non-respect. Les IOBSP exultent.

Le gouvernement s’est décidé à trancher dans le conflit opposant IOBSP et banques. Après avoir laissé la situation pourrir pendant une bonne année, privilégiant « la liberté contractuelle des parties dans le cadre de relations commerciales librement consenties, sous réserve cependant du respect des règles de droit », il soutient aujourd’hui sans réserve les IOBSP.

Bruno Le Maire – rappelant certains fondamentaux juridiques – a dit clairement que le mandat confié au courtier par son client s’impose aux banques, qui ne peuvent en entraver l’exercice. Si la liberté contractuelle autorise les banques à choisir leur cocontractant, cela ne peut se traduire par une éviction des courtiers du marché.
L’interpellation du député Frédéric Cabrolier, relayant celle de l’Union des intermédiaires de crédit (UIC) qui ont récemment rejoint l’Anacofi, rapportait pourtant de multiples signalements d’infraction aux autorités compétentes allant dans ce sens. Une instance opposant l’UIC au Crédit Agricole du Languedoc qui aurait ouvertement écrit qu’il ne souhaitait plus travailler avec des courtiers devrait notamment se tenir courant 2023.

Vers une intensification de la répression

« L’ACPR, l’autorité de la concurrence et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes DGCCRF se renvoyaient la balle jusqu’ici », pointe Bérangère Dubus, secrétaire générale de l’UIC.
C’est ici que réside l’intérêt de cette réponse ministérielle : le gouvernement engage clairement ses autorités de contrôle dans la bataille, citant nommément l’Autorité de la concurrence et la DGCCRF.
« Le ministre appelle tous les acteurs du secteur au strict respect des dispositions prévues par le code monétaire et financier, le code de la consommation et le code civil applicables aux activités d’intermédiation bancaire, écrit le ministère de l’Économie et des Finances. Tout consommateur ou professionnel qui estime que ce cadre a été enfreint peut saisir les juridictions françaises compétentes. »
Ce soutien gouvernemental revigore la profession, parfois perdue dans des litiges à rallonge devant les tribunaux judiciaires. « Face aux coûts de procédure à 25.000 euros et aux banques qui jouent l’intimation en demandant 50.000 euros de dommages et intérêts, c’est une bataille qu’il était difficile de mener seul », plaide Bérangère Dubus.

 

Source Agefiactifs
Publié le 09 janvier 2023